Trois époques, trois films, un documentaire
S’ils ne sont pas acteurs, les frères Bertrand sont habitués à passer devant la caméra depuis plus de 50 ans. Dans les années 70, déjà, ils apparaissent dans des archives télévisuelles en noir et blanc, les bras croisés dans leur marcel, en pleine construction de leur exploitation d’élevage.
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Près de 30 ans plus tard, à l’approche du nouveau millénaire, ils acceptent de se livrer de nouveau devant l’objectif du réalisateur Gilles Perret, un jeune voisin qui leur dédie son premier long-métrage documentaire, Trois frères pour une vie. Cette fois, les Bertrand prennent des couleurs et la famille s’agrandit de nouveaux visages : le neveu, Patrick, son épouse Hélène, leurs enfants…
Cette année, la famille Bertrand fait son grand retour dans les salles obscures pour mettre fin au cycle démarré en 1972 et conclure leur fresque filmique. 50 ans après, ces éleveurs ont-ils trouvé le bonheur ? Comment leur travail a-t-il changé leur vie ? Et surtout, un nouveau cycle est-il possible après eux ? Autant de questions auxquelles ils vont tenter de répondre dans La Ferme des Bertrand, au micro et à la caméra du réalisateur Gilles Perret, qui les connaît bien.
Un portrait social lucide, mais chargé d’espoir
La Ferme des Bertrand s’ouvre sur l’observation attentive de dispositifs de traite modernes par Hélène. Depuis le décès de son mari, elle est à la tête de l’exploitation familiale avec son fils aîné. Et si la question des machines et de l’automatisation crispe plus d’un professionnel, ce n’est pas son cas. Pour elle, ces inventions ne sont pas un moyen de remplacer les agriculteurs et éleveurs, mais plutôt de faciliter le quotidien de travail.
Car s’il fait la part belle aux merveilles de leur profession (le plaisir de consommer les produits frais, le respect de la nature et de l’animal, le cadre sublime des Hautes-Alpes), le dernier documentaire de Gilles Perret n’omet pas pour autant de témoigner de la difficulté de leur tâche. Des trois frères filmés en 1972, seul André est encore présent pour témoigner aujourd’hui de la fatigue qu’il ressent, semblant tisser un lien avec son cadet qui, dans le documentaire de 1997, évoquait déjà son besoin de repos.
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Fascinant triptyque temporel et social, La Ferme des Bertrand jongle entre les images et les époques pour interroger les changements dans l’éprouvante vie qu’est celle d’éleveurs, dans des scènes aussi instructives que touchantes, toujours teintées de l’humour des Bertrand.
Plus fascinant encore se fait le documentaire de Gilles Perret lorsqu’il réfléchit des problématiques contemporaines, parfois étendues au monde du travail en général, notamment la nécessité de dissocier son temps de travail de sa vie personnelle. Les Bertrand y sont-ils parvenus ? De toute évidence, non. Et l’émotion qui cueille Hélène et ses filles lorsqu’elles évoquent leurs proches disparus démontre bien la dureté de leur quotidien, encore aujourd’hui, et malgré la multiplication des moyens à leur disposition.
Pourtant, l’espoir demeure, celui d’une nouvelle génération passionnée, prête à prendre le relais. Déjà, les petits-enfants de Hélène répondent “éleveur” lorsqu’il leur est demandé ce qu'ils souhaitent faire en grandissant. “On se dit qu’on n’aura pas fait tout ça pour rien !”, se réjouit-elle avec enthousiasme.
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Portrait familial et social étendu sur plus de 50 ans, La Ferme des Bertrand, documentaire de Gilles Perret, est à découvrir dès maintenant au cinéma.
