Louis Garrel n'est pas pour rien le fils de son père. Il livre un film dans la plus complète des traditions des films français, notamment issus de la nouvelle vague. L'histoire est belle : c'est une sorte de trio amoureux, composé d'une fille très jolie, incarcérée, qui bénéficie d'une autorisation de sortie en journée, d'un homme sans âge, un peu acteur, surtout très fou, et un troisième homme, une sorte de dandy parisien, maladroit, pompiste dans un sous-sol de la capitale. Le réalisateur a échappé au poncif de l'artiste parisien qui se complaît dans des complexités amoureuses. Il montre des vraies gens, du moins, il essaye. En fait, le regard est tellement décalé de cette réalité des gens que Garrel ne connaît visiblement pas, que le propos en devient caricatural et pesant. Il adopte un ton délibérément réaliste, ce qui rajoute de la grossièreté des personnages qui dépensent à tout va dans des hôtels, parlent de choses à mille lieux de la préoccupation de personnes qui partageraient véritablement leurs problèmes. Les emprunts cinématographiques accentuent la lourdeur du propos. François Truffaut hante chaque image, particulièrement lors de ces plans du cinéma dans le cinéma, où miraculeusement les trois personnages se retrouvent figurants dans des tournages. On peut supposer que le réalisateur de ces tournages, souvent excessif, incarne la figure paternelle du réalisateur, ou plus simplement que Louis Garrel est incapable de faire abstraction à son propre univers personnel. Louis Garrel joue comme Louis Garrel, sauf que cette fois, il se met lui-même en scène. Si la patte de Christophe Honoré est très présente dans le film, à commencer par le scénario dont il est le co-auteur, le manque de distanciation nuit à la mise en scène souvent à la limite de la vacuité. On pense à ces textes ridicules que le pompiste écrit puis lit à la femme d'un client, pendant que son mari va dans une épicerie de nuit. Garrel n'a pas l'intention explicite de réaliser une comédie, du coup, ses personnages n'en sont que plus grotesques. Bref, si le film n'est pas sans intérêt, on peut espérer dans les longs métrages qui suivront un peu plus d'inspiration.